Interview d’Audrey Estrougo, réalisatrice du film « La Taularde »

 

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Son dernier film, La Taularde, sort en DVD aujourd’hui et a marqué le cinéma de l’année 2016 avec une Sophie Marceau sans maquillage, enfermée dans une cellule de 9 mètres carrés à la place de l’homme qu’elle aime. Rencontre avec la réalisatrice Audrey Estrougo qui a dû se battre pour imposer sa vision du monde carcéral féminin.

 Votre filmographie est portée par des femmes fortes qui doivent faire face à un drame personnel. Est-ce le hasard ou un choix délibéré de votre part ? 

Quand je vois vers quoi je vais m’orienter, avec des rôles de garçons, j’ai envie de dire que c’est le hasard. Mais il est vrai qu’en tant que femme, j’ai plus de facilité à m’identifier, me projeter dans un personnage féminin. Ce n’est pourtant pas voulu, pas dans un but de revendication féministe en tout cas.

Pourquoi avoir voulu parler du milieu carcéral ?

J’avais présenté mon film Toi, moi, les autres dans une prison d’hommes et une autre de femmes. Je me souviens du moment où je l’ai présenté chez les hommes et où je me disais que je savais où je mettais les pieds et qui j’allais rencontrer, car on connaît bien le milieu carcéral masculin, notamment via des films et des livres, sans oublier le jeu médiatique qui montre souvent la violence masculine. Je suis sortie de là en trouvant que c’était triste, mais que je n’irais jamais en prison, car je suis socialement du bon côté de la barrière, que je suis instruite, que si je n’ai plus d’argent, je ne braquerais jamais une banque, etc. Et puis, je suis allée dans une prison pour femmes où je me suis posée des questions : qui sont les détenues, est-ce que ce sont les mêmes lieux ? Je ne savais rien et en sortant de là, je me suis dit que je pouvais très bien aller en prison demain finalement, parce que les motifs d’enfermement ne sont pas les mêmes.

Qu’est-ce qui vous a marqué plus spécifiquement après cette expérience ?

Ce qui m’a fasciné chez les femmes, c’est que l’homme est omniprésent, car elles sont là pour un homme, pour faire comme les hommes… Elles sont souvent condamnées à de lourdes peines, car ce sont des délits différents de ceux des hommes : crimes passionnels, légitime défense… Cela raconte quelque chose sur la femme dans la société, face à la justice et j’avais envie de fouiller cet axe-là. Surtout que les hommes et les femmes ne vivent pas l’enfermement de la même manière. Les femmes n’ont pas cette sorte de gloire à la testostérone. Ce sont des mères qui ne voient plus leurs enfants pendant des années, elles sont peu visitées, il y a un aspect psychologique très fort, très lourd. Suite à cette expérience, j’ai monté un atelier d’écriture à Fleury-Mérogis pendant un an et demi, chez les hommes et chez les femmes, pour être en immersion totale. La prison est un monde avec son langage, son fonctionnement qui lui est propre. J’ai beaucoup observé, tissé des liens avec des détenus qui m’ont donné des anecdotes et m’ont éclairé sur le film que je voulais faire.

Le film carcéral est un genre cinématographique à lui tout seul. Aviez-vous des modèles de films en tête avant de vous lancer dans ce projet ?

Pas du tout ! Je prépare mes films en cherchant le langage et la grammaire qu’ils auront et qui sont à chaque fois différents de ce que j’ai fait précédemment. Pour La Taularde, je voulais surtout rendre compte de l’immobilisme. Car les femmes en prison sont enfermées 22h/24. Le film qui se rapprocherait le plus de ma démarche est Le Trou de Jean Becker qui est un huis clos avec une caméra fixe comme ce que je voulais faire. Je voulais toujours un mur en référence, mais tout en l’étirant pour pouvoir mieux filmer. La cellule a d’ailleurs été construite dans un ancien atelier de la prison qui offrait cette disposition. C’est la seule chose qui a été truquée par rapport à la réalité du décor. Dès qu’on sortait de la cellule, je passais en steadycam, avec du travelling pour donner une impression de mouvement, avec du son, des figurantes, parce que pour les détenues, ne serait-ce que d’aller chez le médecin, c’est l’occasion de pouvoir marcher. Un autre film qui m’a inspirée notamment pour ses cadres, c’est La Passion de Jeanne d’Arc de Dreyer car il y a là un côté huis clos également, avec une répétition de scènes jamais filmées de la même manière.

Il y a aussi dans le film la vision des surveillantes…

Je pense que c’est l’un des métiers où l’on se sent seul face à la détresse humaine, face à des gens en colère, en revendication permanente. C’est très difficile. Ce n’est pas une vocation. On a envie d’aider l’autre, mais on est dans un système qui est là pour broyer le détenu et l’on devient un maillon actif de ce système, qu’on le veuille ou non. On est acteur de la déshumanisation de quelqu’un. J’aurais été incapable d’être surveillante de prison. J’aurais tellement eu envie de sauver ces femmes que j’aurais été broyée, mangée toute crue. A chaque fois que je devais caractériser mes personnages de surveillantes, je me demandais si elles décidaient de s’ouvrir ou non aux détenues, avec les conséquences que cela peut avoir. C’est un métier qu’il faudrait valoriser et aider, car il est encore trop dénigré. Les surveillant(e)s de prison devraient avoir une médaille. D’ailleurs, ces derniers se sont montrés méfiants quand j’ai voulu parler de leur métier dans mon film, parce qu’aux yeux de la société, leur métier est une agression. Mais c’est aussi parce que notre système pénitentiaire date du Moyen-Age, très judéo-chrétien où le mal doit être puni. Le règlement est ultra rigide et le détenu est obligé de s’y soumettre, ce qui ne règle pas le problème. On ne se pose pas la question de la réinsertion, de tout mettre en œuvre pour que les détenus s’en sortent et ne soient plus inadaptés à la société.

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La violence est plus psychologique que physique. Une volonté de votre part ?

Oui, car l’enfermement chez les femmes est dur à vivre psychologiquement et la violence ne se manifeste pas de la même manière que chez les femmes. Je me suis aussi rendue compte qu’on ne croyait pas à la violence féminine en tant que spectateur. Il y a pourtant des scènes que j’ai vues, qu’on m’a racontées, mais que je ne pouvais pas mettre dans le film, car on ne m’aurait jamais crue. Ca a été une grande question pour moi : aller dans le jeu de la réalité et montrer cette violence ou non ? J’ai estimé que ça n’aurait pas servi mon propos et je me suis alors arrêtée à une violence psychologique et qui restait dans le domaine du recevable. Ne serait-ce que pour pouvoir être produite, car c’était déjà très difficile à monter.

Vous aviez besoin d’une star du coup pour que le film puisse voir le jour ?

Je n’avais pas prévu de tourner avec Sophie Marceau à la base, ni avec aucune star. Mais il se trouve que j’ai rencontré Sophie Marceau, par hasard, sur un quai de la gare Marseille-St Charles, un dimanche après-midi. J’avais en tête une toute autre image d’elle, intouchable, grande, sexy, glamour. Mais là, j’ai rencontré une femme simple, qui revenait de la plage, en jean et en tongs. J’ai vu quelqu’un de très fort, car elle a une vraie puissance en elle et une grande fragilité qui cohabitent ensemble. Je l’ai laissée prendre son train et décidé de faire des démarches pour la recontacter. C’était le seul rôle qui me manquait, alors que cela faisait plus de trois ans que j’essayais de faire exister ce film. Mais ça n’a pas été simple pour autant, car la plupart des producteurs n’imaginait pas Sophie Marceau autrement que dans une comédie romantique. Ca a été une vraie bagarre pour qu’elle soit légitime à leurs yeux. On l’a fait avec peu d’argent, 1,7 millions de budget sur cinq semaines. Mais Sophie est une grande bosseuse, humble, qui s’intègre facilement à un groupe, sans prétention de star, sans se mettre au-dessus de nous, elle a été la meilleure camarade possible, sans jamais râler. Et parce qu’elle a eu cette attitude-là, les autres comédiennes ont suivi. Elle a été un vrai exemple. Et le film est devenu visible grâce à elle.

Avez-vous vu le film 3 000 Nuits de Mai Masri qui retrace également le milieu carcéral féminin et qui vient de sortir ?

Oui, tout à fait. C’est un film nécessaire qui parle d’un conflit géopolitique et c’est plus ça qui m’a plu que ce qui se passe dans cette prison. C’est ça qui est intéressant dans les films de genre : pouvoir dénoncer de manière détournée.

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Amoureuse de Paris, j'aime partager mes découvertes culturelles, gastronomiques... Je vous dis ce qui m'a plu pour vous donner envie de sortir dans cette si jolie ville qu'est Paris où l'on a la chance d'avoir tant à faire, à voir, à goûter et à tester... Également désormais : des interviews !

2 commentaires sur « Interview d’Audrey Estrougo, réalisatrice du film « La Taularde » »

  1. Je viens de regarder le film cet après-midi sur OCS, et je dois dire que j’ai été bluffée par l’interprétation par Sophie Marceau, cela je l’avais entendu. Film d’après elle dont elle n’était pas sortie indemne de ce tournage.
    D’autres interprétations sont excellentes aussi. Excellent film qui je pense n’aborde pas l’horreur de cet univers dans son entièreté, ce serait trop irrespirable. Un film bien fait, réaliste, abordé avec tout de même le ton juste et ne me suis pas sentie trop heurtée par les scènes qui doivent certainement être plus nombreuses dans ces prisons.

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