Face à la matérialité du monde moderne : Un peu de poésie dans le métro !
Sur scène : quatre chaises, deux néons et une sorte de barre de métro au centre. C’est le décor minimaliste des Métronautes. Le conducteur, un musicien percussionniste créé l’espace sonore du métro et sa mécanique : ses freinages, ses sonneries, ses annonces… Il rythme les entrées et sorties des huit comédiens.
L’espace restreint oblige à la promiscuité avec l’autre. C’est ce que le metteur en scène Arthur Deschamps dépeint avec habileté en mettant en musique ces relations sociales imposées. Commence alors la valse parfois mécanique des gens dans les transports. Dans ce wagon poétisé, les personnages vont se fuir, s’observer, s’endormir, chanter, crier, danser. Ils sont rêveurs ou en colère, amusants ou perdus , et les talents multiples des comédiens permettent de nous embarquer au fil de leurs émotions. La danse, le clown, le burlesque, le chant, tout s’entremêle dans les saynètes. Le tourbillon comique fait passer du rire à la tristesse. Pas de verbiage : peu de paroles, très pesées pour un sens encore plus affuté.
Le spectacle nous renvoie justement à “nos névroses, nos fantasmes, nos fantaisies, nos absences, nos préjugés, nos peurs” comme l’explique le metteur en scène. Inspiré par l’univers de la tribu Deschamps-Makeïeff, dont il est l’un des fils, il rend aussi hommage au cinéma de Jacques Tati ou de Buster Keaton. Au théâtre, on peut également penser aux “Diablogues” de Roland Dubillard ou sous certains aspects à la poésie de Jean Tardieu.
“Si le métro est une partition, les personnages en sont les notes qui entrent et sortent, se mélangent et font corps, forment des accords ou même des désaccords, des rencontres heureuses ou malchanceuses et tracent des trajectoires, une mélodie.” Arthur Deschamps
À l’aide de ce dispositif particulier, Arthur Deschamps, auteur et metteur en scène, parle aussi du frottement qu’induit une relation humaine dans un espace contraint à travers l’étrangeté de certains moments du quotidien et la poésie qui en émane. Situations insolites et loufoques, ces courts voyages traversent aussi les songes des passagers avec des moments imaginés, éthérés, absurdes. Et c’est précisément cela qui plaît chez ces Métronautes : quelques soient leurs classes sociales, tout ce petit monde se mélange au même niveau d’égalité dans cette micro cour des miracles provoquant une “poésie cataphile”. L’énumération des lignes de métro prend soudainement un autre aspect et ses passagers peuvent virevolter autour d’une barre de métro sans que cela nous paraisse incongru mais au contraire nous emporte dans un autre espace-temps nous faisant presque regretter que ces situations n’arrivent pas davantage dans la vie réelle.
Il faut aller découvrir cet univers si original, drôle et réjouissant servi par d’excellents comédiens tous agilement dépeints…et qui ont adopté ce langage poétique comme une seconde nature.
Avec Patrice Bertrand, Luana Duchemin, Nicolas Fenouillat, Marina Glorian, Lucas Hérault, Alexandre Lenis, Canaan Marguerite, Marlène Rabinel, Pauline Tricot
Costumes Félix Deschamps
Lumière et régie générale François Menou
Mise en scène et écriture Arthur Deschamps
Assistante à la mise en scène Camille Mérité
Chorégraphie Nour Caillaud
Accompagnement corporel Paul Ankri
Percussions Nicolas Fenouillat
Au Théâtre13- Seine
30 rue du Chevaleret
75013 Paris
du 21 mars au 04 avril 2018
Les mardis, mercredis, jeudis, vendredis, samedis à 20h
Les dimanches à 16h
Durée : 1h20 sans entracte