Journal d’un vieux confiné… Jour 43

En cette période de confinement, mon ami Rodolphe Trouilleux, qui vient de rejoindre le blog vous fait part d’un journal imaginaire : « Journal d’un vieux confiné  »  Historien, auteur de nouvelles, conférencier, rédacteur au Journal Le Chat Noir, on me présente souvent comme le spécialiste de Paris secret et insolite, rappelant en cela mon livre éponyme. C’est un peu vrai mais Paris dans son ensemble me passionne depuis toujours. La ville d’hier et d’aujourd’hui, ses multiples histoires et faits divers occupent mon quotidien. Incorrigible piéton, je parcours les rues parisiennes en tous sens, et mes découvertes sont nombreuses. Qu’elles soient théâtrales, littéraires, gastronomiques, etc, les surprises sont souvent au rendez-vous et c’est un plaisir de les partager.

 

Quarante troisième jour de confinerie


Ce soir, ou plutôt ce matin, on a fait comme d’habitude de tous les soirs. On a monté nous coucher après avoir entendu en passant la vioque ronfler comme un signal d’alarme. Rien à voir de ce côté. Faut dire que comme il était quatre heures du matin sa nuit elle l’avait déjà pas mal entamée. Bref, comme l’a soirée était pas banale, j’ai voulu faire grand luxe pour me pieuter : j’ai mis le pyjama que je garde d’habitude en cas que j’aille à l’hosto, un machin tout bleu avec des lunes et des soleils qui rigolent dessus. L’asticote elle s’est calée contre moi, et le Cui cui il a commencé à attaquer mes pieds. Maman elle a rien changé à ses habitudes : sa robe rideau de douche pour la nuit et des bigoudis dans les tifs.

On a fait comme si et pourtant ça allait pas comme ça.

Après le champ’ on a sifflé des fonds de bouteille et des alcools bizarres avec des étiquettes foireuses qui nous venaient du Cochonnet. Il aimait bien les trucs comme ça, genre la goutte du Père Ernest, un tord boyaux qui peut rendre fou si on en abuse. Y a même des gens qu’on vu leurs cheveux tomber après en avoir bu !Bref, on était fin bourrés avec la divine. On a passé la soirée à causer, à rigoler, à pleurer, à encore rigoler et encore pleurer, dans le genre essorage des amidales et zieux à la coque.

Elle m’a expliqué sa vie de gosse et de jeune homme, en me montrant toute les photos. Faut dire que ça se mélangeait un peu dans ma tête quand Maman elle parlait de Léon comme si c’était d’elle. Mais faut dire que c’était lui aussi avant d’être elle. Un sacré merdier pour ma cervelle. Déjà qu’elle baignait dans la gnôle alors côté repères j’étais pas au meilleur de ma forme. Si c’est pas malheureux tout de même ! Quand il était petit, le Léon, il aimait déjà pas sa vie de garçon et ses nippes, genre les culottes courtes, les chemises à carreaux en coton épais et les chaussettes montantes. Y savait pas pourquoi mais ça le gênait. Un jour comme ses parents s’étaient barrés à un mariage il est resté tout seul, mais là il avait encore grandi, du genre qui commençait à être bouleversé par des choses bizarres. Il avait des trucs qui commençaient à pousser et ça lui plaisait pas des masses. Enfin bref, ses vieux étaient pas là, il a été cherché une robe de rombière à sa mère et il a mis du maquillage et y s’est regardé dans la glace.

Et c’est là qu’il a su qu’il était plus Maman que Léon, c’était comme ça et pas autrement.

Un jour, comme il avait recommencé à se maquiller, y s’est pointé pour dîner comme ça avec ses parents. Ça a chauffé un maximum avec le Cochonnet qui avait fait des réflexions désagréables avec des sous entendus un peu lourdingues, comme quoi le Léon il était un pédé sexuel et qu’il avait honte et que s’il avait su…S’il avait su quoi ? Déjà qu’il savait pas grand’chose !

Bref il a fait celui qui voulait plus parler à son fils ou des conneries comme ça. Il était vexé, c’est tout. Léon il a rien dit et il regardé sa mère qui, pour une fois, ne disait rien ; Elle bouffait sa soupe en silence… Sacrée soirée ! Le Cochonnet y tomba dans les bras du Père Ernest en direct et y passa toute sa nuit fin bourré. Ça lui a fait bizarre à Léon quand il a surpris le lendemain son père en train de pleurer dans les bras de sa mère, comme un gosse qu’aurait fait une grosse bêtise. Sa mère a embrassé le Léon et elle lui a rien demandé de plus. Le Léon après il a passé une adolescence pas des plus terribles.

Y savait pas quoi faire de ses sentiments et quand il était tout nu il aimait pas se voir dans la glace. Il a même été avec une fille, très gentille, mais y savait bien que c’était pas pour lui.Tout a changé quand, à vingt ans il a rencontré une fille formidable… Une gonzesse qu’avait du caractère, plus âgée que lui… Marcelle qu’elle s’appelait.

Avant c’était Marcel…

Allez on dort… Et pour la suite on verra demain.

Copyright R.Trouilleux

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Historien, auteur de nouvelles, conférencier, rédacteur au Journal Le Chat Noir, on me présente souvent comme le spécialiste de Paris secret et insolite, rappelant en cela mon livre éponyme. C’est un peu vrai mais Paris dans son ensemble me passionne depuis toujours. La ville d’hier et d’aujourd’hui, ses multiples histoires et faits divers occupent mon quotidien. Incorrigible piéton, je parcours les rues parisiennes en tous sens, et mes découvertes sont nombreuses. Qu’elles soient théâtrales, littéraires, gastronomiques, les surprises sont souvent au rendez-vous, et c’est un plaisir de les partager.

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