Une satire cinglante du monde des grandes entreprises
Plus que quelques jours pour découvrir Affaires courantes, la nouvelle pièce de Xavier-Valéry Gauthier, avec Brontis Jodorowsky en homme d’affaires implacable qui cache des fêlures aussi importantes que son compte en banque…

Achille Harlay de Thou est milliardaire. Un mot qu’il brandit dès qu’il le peut, tantôt comme une carte de visite, tantôt comme une arme, persuadé que l’argent peut tout acheter. PDG d’une multinationale consacrée au papier hygiénique, il le prouve régulièrement : toutes les personnes qu’il croise cèdent face à son porte-feuille bien garni. Une maison familiale qui lui tape dans l’oeil ? Il la rachète tandis qu’elle n’est même pas à vendre. Une psychologue qui refuse de le tutoyer ? Quelques billets y viendront à bout et la transformeront en objet de fantasmes de femme prostituée qui monnaye ses charmes, mais attend surtout un amour qui ne viendra jamais. Tout s’achète pour Achille Harlay de Thou, même la mort…

Car l’homme ressent au fond de lui des fêlures qui craquèlent de plus en plus et lui font faire des choix qui étonnent jusqu’à ses employés, ses actionnaires, son avocat et tous ceux qu’il approche. Cynique en diable, il a conscience de son pouvoir et de ses doutes qu’il tente de dissimuler sous une carapace insensible, lui qui n’hésite pas à licencier ceux qu’il venait de rassurer…

C’est donc une satire cruelle que nous livre le metteur en scène (et comédien) Xavier-Valéry Gauthier avec ces Affaires courantes qui met en avant un Brontis Jodorowsky impeccable qui fait froid dans le dos. Le moindre de ses sourires paraît carnassier alors qu’ils sont parfois d’une sincérité désarmante. Face à lui, la distribution est au diapason, Juliette Croizat en tête en prostituée psychologue dépassée par les atermoiements de son client/patient. La mise en scène est fluide, avec ces changements de décor à vue par les employés d’Achille, uniforme et casque vissé sur la tête, comme s’ils étaient ses hommes à tout faire en toute circonstance. Même les pires. Mais qu’on ne croit pas que ce texte pessimiste soit dénué de moments humoristiques. C’est une comédie froide à la Michael Haneke, réjouissante dans cette descente aux enfers d’un homme qui a tout, sauf l’essentiel, l’amour des autres et de lui-même…
Affaires courantes, au Théâtre de Belleville jusqu’au 18 février.
94 Rue du Faubourg du Temple
75011 Paris