
On s’y rend au triple galop !
War horse pose actuellement ses sabots à la Seine Musicale. Le célèbre spectacle qui mêle théâtre, musique et marionnettes équestres, est une fresque historique en plein cœur de la première guerre mondiale, autour d’un jeune homme prêt à tout pour retrouver son cheval, perdu dans les tranchées. Immanquable.

War horse est un audacieux pari. A l’origine, un roman, de Michael Morpurgo, succès d’estime en librairie et peu à peu oublié, jusqu’à ce que le dramaturge Nick Stafford décide d’en faire une pièce de théâtre. Mais comment faire quand le héros principal, Joey, n’est autre qu’un cheval de course ? Qu’à cela ne tienne, il sera sous la forme d’une marionnette animée par des humains visibles, sous et à côté de la structure. Et il en sera de même pour tous les autres animaux du récit. Si sur le papier tout semble de la folie, quand le spectacle voit le jour, c’est un pur émerveillement.

Un succès international, du West End londonien à Broadway, porté également par l’adaptation cinématographique de Steven Spielberg. C’est dire si cette histoire d’un jeune fermier anglais qui s’engage dans l’armée en plein cœur de la Première Guerre mondiale pour retrouver son cheval envoyé dans les tranchées de la Somme, était digne d’être montrée. Mais le public français n’ avait pas encore eu l’occasion de l’applaudir. C’est désormais chose faite, grâce à Thierry Suc, l’homme de tous les spectacles qui impressionnent, à commencer par les concerts monumentaux de Mylène Farmer. Dès lors, Cheval de guerre ou War Horse peut investir la Seine Musicale en toute sérénité, pour notre plus grand plaisir.

Tout d’abord, on est surpris par le plateau nu. Ici, point de décor imposant, tout se fait par bribes, accessoires et symboles. Au-dessus de la scène, un écran en forme de nuage, où sont projetées des images de décor ou des illustrations sous forme d’ombres chinoises ou de gravures. Les lumières sont à l’avenant : ocres, jaunes, bleues ou blanches, en fonction des ambiances que l’on veut donner. On reste dans l’intime, d’où surgit régulièrement le grandiose. La petite histoire dans la grande est en effet magnifiée grâce aux marionnettes qui représentent les chevaux, notamment Joey et Topthorn, les véritables héros de ce récit initiatique, où le jeune Albert passe de l’enfance à l’âge adulte, en se retrouvant propulsé dans la guerre des hommes. Il quitte sa paisible ferme pour le combat, avec une seule idée en tête, retrouver ce cheval qu’il aime tant et qu’il a vu grandir. Pièce sacrificielle (Albert et Joey, séparés, affrontent la mort régulièrement et voient ceux qu’ils aiment tomber) et cathartique, on assiste à une véritable prouesse artistique pendant les 2h30 que dure le spectacle.

Il y a en effet énormément de numéros de bravoure (dont certains pourront impressionner les jeunes spectateurs). Que ce soit l’ouverture avec la trentaine d’artistes présents sur scène ou les grands moments de bataille où les marionnettes s’animent au milieu du chaos (on finit par oublier qu’elles sont manipulées par des hommes et des femmes à la dextérité précise), War horse est un spectacle raffiné et grandiose, sans être grandiloquent. Nulle ici de prétention d’en mettre volontairement plein la vue. On reste au service d’une histoire universelle, que l’on vit en immersion totale (le spectacle est en anglais sur-titré, les comédiens surgissent parfois de la salle et demeure une ambiance crépusculaire du début à la fin), avec l’impression, tenace, d’assister à un événement unique en son genre. Seul bémol, une fin un peu trop précipitée qui annihile toute l’émotion retenue qui ne demandait qu’à se déverser. Mais rien qui n’entache la joie presque enfantine de cet hymne à l’amour et à l’humanité. A hennir de plaisir !
Seine Musicale, Ile Seguin à Boulogne Billancourt.
Jusqu’au 29 décembre, du mardi au dimanche à 20h, les samedis et dimanches également à 15h.
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