Pas de pères sans impairs !
Au théâtre du Splendid où a débuté son père, Arthur Jugnot se lance avec Moi Papa ? dans un seul en scène autour de la paternité. Un thème universel où l’on croit que tout a déjà été dit. Mais c’était sans compter une mise en scène intelligente et originale de Sébastien Azzopardi et l’abattage impressionnant de Jugnot (plus si) junior.
Au commencement était le couple. Des moments intenses pleins de passion à la routine du train train quotidien, Arthur Jugnot égraine ce qui fait le ciment du couple, de sa complicité avec l’autre à rire d’un rien au seul plaisir d’être à deux qui se suffit à lui-même. Jusqu’au jour où sa compagne souhaite un enfant. Un désir lointain qui se rapproche de plus en plus et qui devient presque inéluctable, un peu comme une menace. Et finalement, la grossesse, éprouvée tant par madame (les kilos en trop, les sautes d’humeur) que par monsieur (les kilos en trop par procuration, les sautes d’humeur, aussi). Et enfin, les dernières heures où l’on est deux avant de devenir trois. Et se transformer en papa. À son tour. Et là, drames et comédie s’entremêlent. Car comment être père ? Comment savoir ce qu’il faut (ou ne pas) faire avec bébé ? Comment l’élever du mieux possible ? Comment ne pas reproduire les erreurs de ses aînés et ne pas en créer d’autres à son tour ? Et surtout, comment faire perdurer son couple quand tout tourne autour de l’enfant et d’un manque certain de sommeil ?

Autant de questions universelles que l’on a déjà vu, lu, entendu, mille fois, depuis la nuit des temps, depuis que l’homme est homme. Au point qu’on se demande pourquoi en faire tout un spectacle. Après tout, ce que traverse Arthur Jugnot (ou son double de fiction), tout père l’a déjà éprouvé. A qui donc se destine ce spectacle ? Aux papas qui revivent ainsi leur paternité comme si c’était la première fois ? Aux futurs pères qui vont expérimenter à l’avance ce que le personnage endure ? Aux enfantophobes qui seront ainsi confortés dans leur choix de ne pas avoir de progéniture ? Ou pour leur convaincre d’en avoir une un jour ? Et finalement, ces questions cessent de nous hanter. Grâce à un décor impressionnant sur lequel sont projetés des hologrammes qui interagissent avec le personnage, qui évolue au fur et à mesure que grandit l’enfant, qui semble vivre au gré du spectacle comme un partenaire de jeu. Grâce à la mise en scène de Sébastien Azzopardi, grand complice d’Arthur Jugnot et qui a composé pour lui, une partition au cordeau avec inventivité, magie et surprises en tous genres qui font du spectacle un moment inattendu dans un texte qui l’est moins. Et surtout, grâce à Arthur Jugnot qui, entre des moments de surchauffe et quelques interpellations improvisées avec un public conquis, instille de l’émotion, de la sincérité vibrante et un plaisir incommensurable d’être sur scène. S’il ne raconte pas son histoire, c’est de lui tout de même qu’il s’agit. Père à son tour, c’est aussi un hommage indirect au sien, qu’il fait à travers ce spectacle. Ce qui en devient encore plus touchant. Moi Papa ? ou l’envie subite d’étreindre son père, tant qu’il en est encore temps…
Moi papa ? Jusqu’au 5 mai 2018, du mercredi au samedi à 21h. Le samedi également à 16h30.
Théâtre du Splendid, 48 rue du Faubourg Saint-Martin, 75010 Paris.