Quand Virginie saute du Hocq à l’âme
Avec son nouveau spectacle Virginie Hocq ou presque, la comédienne belge propose un seule en scène dont elle a le secret, entre absurde, burlesque, grivois et émotion. Un spectacle qui va ravir ses fans déjà conquis.
Cela faisait depuis 2006 qu’on n’avait plus vu de one woman show de Virginie Hocq. Elle avait alors tiré le fil de vies saugrenues, tantôt pathétiques, tantôt inattendues, avec des personnages nés dans son esprit vagabond. Ensuite, on a pu l’applaudir au théâtre, aux côtés de Zinedine Soualem dans la pièce C’était quand la dernière fois ?. Elle propose ici dans ce (presque) seule en scène, un format hybride entre ce qu’elle a proposé jusqu’à maintenant et le théâtre pur et dur. Elle parvient en effet à tenir près d’1h30 sans se ménager une seconde, avec un postulat qui tient en une ligne : Virginie doit déménager l’appartement de son père récemment décédé et chaque objet va lui rappeler des souvenirs précis qu’elle va partager avec le public.
De fait, le décor est composé d’un plateau tournant entre extérieur et intérieur de la maison paternelle et de tout un bric à broc d’objets hétéroclites, entre animaux empaillés, piles de livres, disques vinyles, vieilles photos et plats à pâtés en croûte (si, si). Certains spectateurs auront d’ailleurs la « chance » de repartir avec certains d’entre eux. Dès la première minute, on retrouve la Virginie Hocq que l’on connaît depuis une quinzaine d’années déjà : souriante, avenante, accueillante, brisant allègrement le quatrième mur, même si, Covid-19 oblige, elle ne fait monter personne sur scène avec elle pour partager un de ces moments autant conviviaux qu’embarrassants dont elle raffole. Elle offre toutefois des moments de véritable complicité avec le public, comme un blind test endiablé sur des musiques des années 1970 ou une séance de divination d’âge de certains spectateurs, en fonction de leur prénom. Bien évidemment, Virginie n’en oublie pas de parler de sexe avec sa faconde habituelle. Un grand sourire et des yeux malicieux pour traiter des parties génitales à la manière d’une enfant qui découvrirait le sujet. Dans chaque spectacle de l’artiste, c’est un passage presque obligé, de la ménagère qui tient sa liste de course tout en faisant l’amour dans des positions acrobatiques, à la bourgeoise qui organise une partie fine chez elle avec quelques amis triés sur le volet.
Il faudra toutefois, attendre un peu pour trouver du fond dans la forme, là où Virginie Hocq manipulait les deux simultanément avec bonheur lors de ses précédents spectacles. Comme si elle souhaitait repousser jusqu’au dernier moment le fait d’aborder des choses plus intimes (la vieillesse, l’enfance, la mort…). En attendant, elle fait du fan-service à un public conquis d’avance, qui rit de la moindre de ses grimaces, de sa bonhommie naturelle et de sa haute silhouette dégingandée. Tout en offrant des prétextes à des sketches de temps à autre, avec des personnages typiquement hocquiens, tels le « ‘dicapé mais pas con » déjà vu à ses débuts et qui fait son grand retour ou une vieille dame libidineuse en quête de mari dans les cimetières. Et c’est grâce à un subterfuge inattendu (et dont nous ne dirons rien) qu’elle va s’épancher davantage, verser dans l’intime et rajouter de l’émotion à ce spectacle qui, comme elle, ne ressemble à nul autre. Les fans seront une nouvelle fois sous le charme, celles et ceux qui la découvriront se verront offrir un condensé de tout ce qui fait sa particularité : une empathie immédiate, servie par une énergie inépuisable et une faculté à se muer en un personnage hors norme en une poignée de secondes. Virginie Hocq ou presque ? Non, totalement !

Au Théâtre Tristan Bernard, 64 rue du Rocher 75008 Paris
Pendant le couvre-feu, les vendredis à 18h30 et les samedis à 18h.