Un peu de sagesse dans ce monde technologique !
« Science sans conscience n’est que ruine de l’âme » écrivait Rabelais dans son Pantagruel. Le spectacle de Guillaume Loublier vaut assurément le détour. Le comédien a la technologie à coeur, le sens au cœur et les talents d’un hacker, au sens où les coachs anglo-saxons l’entendent. Ils parlent de hacking des émotions pour les stratégies mises en place pour les détourner et ici, c’est d’intelligence artificielle qu’il s’agit.
L’auteur et interprète de ce one-man-show aux multiples visages, l’excellent Guillaume Loublier, sert au public des personnages aussi divers qu’un transhumaniste vénal, un scientifique amoureux de l’humanité mais aussi des figures attachantes par leurs émotions et leurs recoins retors. Il est convaincant dans son interprétation du fou policé Pierre, aux codes à s’y méprendre semblables à ceux de puissants, que l’on croise sur nos écrans. Ce personnage, s’il souhaite d’un côté la fin des émotions, joue de l’autre sur celles de son public.
Le sage et volubile Jacques nous met quant à lui en garde de tomber dans la “Google du loup”. Une mention spéciale à la charmante Laura Charpentier, qui nous a accueilli.e.s à l’entrée du théâtre, offre sa si jolie voix à Simone, le robot créé par Jacques. Le spectacle lui doit également sa mise en scène et ses décors intelligents.
Guillaume nous partage l’énergie incroyable de son personnage Balthazar qui nous offre sans répit une succession de sketches savoureux. La touchante Gerda déclame une Lorelei, occasion pour le comédien d’interpréter sur scène avec brio l’alcool du désespoir.
Si, tout au long de son spectacle, Guillaume Loublier ouvre des petites portes qui poussent à la réflexion sur humanité, le comédien, qui a assurément l’art de la formule, aime organiser des débats avec son public. Il aime jouer avec le paradoxe, d’un impossible « calme plat sur une terre ronde ». L’humanité résistera-t-elle aux sirènes du transhumanisme ? Un paradoxe de taille est soulevé par les algorithmes, qui montrent que non seulement les machines sont prévisibles mais aussi la personne humaine, qui finalement n’a pas évolué en son for intérieur depuis des millénaires, contrairement à la technologie qui la dépasse de manière exponentielle.
Tout ce à quoi l’on résiste, persiste.
La seule chose qui est sûre, c’est que la mort c’est pour la vie.
Ce dont on a le plus besoin, on n’a pas envie de l’entendre.
Voici quelques aphorismes savoureux, glanés au long d’une pièce qui est une expérience à savourer.
À Avignon du 7 au 28 juillet à l’Espace Alya à 16h35 (relâche les mardi)
